Les Troménies de Locronan et les enclos paroissiaux
Lors de sa conférence, Patrick Dubert a évoqué l’anthropisation de l’espace à travers les Troménies de Locronan et les enclos paroissiaux. En géographie et en écologie, l'anthropisation est la transformation de l'environnement par la présence de l'être humain ou son action. On passe de la Nature à la Culture.
Il est d’abord revenu sur la stratification culturelle bretonne (le néolithique, l’âge de fer, la période romaine, les migrations en Armorique, la christianisation partielle au Moyen-âge, la Contre-réforme et l’âge d’or breton, la celtomanie de la fin du 18ème siècle, le renouveau culturel breton, le syncrétisme et le marketing touristique du 20ème siècle et la mode de la celtitude du 21ème).
1) Les Troménies de Locronan
Le mot « troménie » est une francisation du breton tro-minihi, littéralement tour (tro) du minihi dérivation du latin monachia (espace monastique du haut Moyen Âge). Une troménie consiste en une longue procession circulaire sur un territoire donné. Son tracé est chrétien, préchrétien et solaire.
La troménie la plus connue est celle de Locronan dans le Finistère. La pratique est inscrite à l'Inventaire du patrimoine culturel immatériel français depuis 2020.
La grande Troménie de Locronan se déroule tous les six ans en l'honneur de saint Ronan. Le parcours sacré de la Troménie est jalonné de 12 pierres remarquables et de 42 petites huttes.
Son parcours s’étale sur un peu plus de 12 kilomètres à travers la plaine du Porzay et la montagne du Prieuré. Le parcours de la petite troménie, qui se déroule tous les ans entre deux grandes troménies, est de six kilomètres.
Le sens de la Troménie varie selon les époques :
- au Néolithique et à l’âge du fer : animisme et harmonisation avec le temps céleste et les cycles naturels ;
- au Moyen-âge : pénitence, foi et espérance ;
- aujourd’hui : retrouvailles d’une communauté autour d’un fondateur.
Patrick Dubert les a rapprochées des ostensions limousines, notamment celles de Saint-Junien.
2) Les enclos paroissiaux
L'enclos paroissial est un ensemble architectural religieux clos d'un mur dont les plus célèbres se trouvent dans le Finistère où ils rivalisent de magnificence. Un enclos paroissial se compose d’un mur d'enceinte, une porte triomphale, un placître, un calvaire, un ossuaire, une église et deux échaliers. On y trouve parfois des stèles armoricaines de l’âge du fer qui ont été christianisées et déplacées vers les enclos. Situé à un carrefour au centre du village, c’est le lieu de rencontre du laïque et du religieux, c’est aussi la rencontre entre le passé et le présent.
C’est un espace monumental figé. L’art est ici un hommage à Dieu. Les enclos proposent un parcours de la mort vers la résurrection et révèlent l’importance du culte des saints, et celui des morts dans la culture bretonne.
Ces splendides monuments érigés du 15e au 17e siècle, célèbrent bien sûr la ferveur régionale mais également la prospérité liée au commerce du lin et du chanvre. Leur développement a aussi pour origine l'essor des foires liées aux grands événements de la vie liturgique, le contexte de la Contre-réforme ainsi que l'importance du culte des saints locaux et des morts, témoins du syncrétisme breton.